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LA WARTBOURG


Les Allemands aiment et comprennent la nature. Cependant, lorsqu’ils en reproduisent quelque aspect, afin de mêler à leur vie familière la mémoire des beaux paysages hantés par la légende, ils obtiennent sans effort une remarquable laideur. Quels bibelots ils fabriquent et vendent à profusion : fleurs séchées, collées, maquillées, enrubannées ; « vues » peintes sur des boîtes, des coupe-papiers, des vitraux haïssables ; « objets d’art » faits avec des cornes, chromos-lithographies, dont la pauvre hideur doit fixer le souvenir de quelque excursion. Ils ont cherché passionnément, et senti le mystère de la forêt, la sérénité hautaine des horizons… Et ils achètent l’affreuse camelote pour se rappeler plus exactement… C’est trop difficile en vérité de comprendre l’âme des autres !

Je songe à cela tout en déjeunant à Eisenach, dans une salle à manger inouïe ! C’est une grotte. Des rochers de plâtre et de liège pendent et se tortillent convulsivement ; puis viennent des arceaux incompréhensibles. Pour plus de gaieté, de grandes glaces s’incrustent çà et là dans les masses tourmentées du bouchon. Pour plus de féerie, on a