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dresde

partout. Partout, excepté à la place où se dressent les quelques arbres et la grande pile de pierres…

J’avance lentement, le cœur serré. Enfin, j’arrive près des arbres. Une grille protège le jardinet envahi de lierres. Au centre, sur une sorte d’autel, une couronne de lauriers, un casque, un lourd glaive romain sont sculptés. Puis une inscription en langue allemande : Ici Moreau le héros tomba aux côtés d’Alexandre, le 27 août 1813.

Je regarde… Mes yeux, ensuite, vont à la grande pile de pierres dressée hautaine sur le ciel : le monument de Bismarck ! Il a un aspect formidable, une dure simplicité orgueilleuse. Chaque année, au mois de juin, par centaines, les étudiants viennent là et, pour glorifier ensemble la mémoire du grand homme et la patrie allemande, allument d’énormes brasiers. Ces feux de joie doivent jeter leurs reflets jusque sur la couronne de lauriers offerte par les ennemis de la France à ce « héros » français, qui tomba aux côtés d’Alexandre…

Il en est tombé bien d’autres en ce terrible jour d’août : vingt mille hommes tués ou blessés. Il me semble que celui-là seul soit vraiment mort : ce traître !

Moreau fut un grand homme de guerre et, un temps, servit glorieusement son pays. Qu’importe ! Il tomba aux côtés d’Alexandre ! Napoléon enviait Moreau ? Moins que Moreau n’enviait Napoléon. Napoléon fut injuste pour lui ? Et lui, pour la France ?

On le traite mal. Peut-être n’eut-il aucune part