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moritzbourg

De l’art militaire, il ne savait rien ; mais il savait se faire suivre et obéir, tapait dur, tuait rondement et ne connaissait nulle crainte. La prise et l’incendie de Prague demeurent un chef-d’œuvre du genre par la parfaite destruction, et aussi par la férocité savante qu’il mit en chaque détail. Il a mieux contribué que nul autre à faire du nom de Suédois un terme de haine et d’épouvante. L’horreur marchait devant lui. Et avec tout cela, il était gai comme personne. On raconte que, trouvant une statue d’or massif dans l’église de Paderborn, il la serra contre son cœur, la baisa tendrement, et avec un bon rire, cria : « Sois béni, cher saint, de m’avoir attendu ! » Il emporta le saint, et d’autres objets en même temps.

Les traités qu’il plaisait aux princes de conclure, il n’y attachait pas la moindre importance. Il méprisait souverainement la politique. La paix de Westphalie n’arrêta pas une minute son attention. Elle était signée quand l’envie lui vint d’aller mettre le siège devant Brême, et il y alla. Une clameur indignée s’élève par toute l’Europe. Qu’importe à Christophe-Jean que l’Europe s’indigne ! La guerre l’amuse, il fait la guerre, cela ne regarde que lui, n’est-ce pas ? Le Sénat de Stockholm et la Chambre impériale le citent à leur barre. Mais il reste tranquille, se moquant fort de ces gens qui prétendent imposer leurs lois ridicules à un Kœnigsmark.

Lorsque, échappé sans dommage à tous les périls, il revint en Suède, on lui pardonna et même il fut