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un voyage

Dans cette nuit, masquée, embusquée, veille la comtesse de Platen. Elle le voit, près d’une petite porte. Il fait un signal, attend. La porte s’ouvre enfin… La Platen court chez le vieux duc, lui dit que Kœnigsmark vient d’entrer chez la princesse. Il faut arrêter ce misérable, punir cette coupable. Elle tempête, fait rage. Le vieil homme hésite, puis — il a sommeil sans doute — signe l’ordre d’arrestation et confie tout à la Platen.

En quelques instants, elle met des gardes à toutes les issues, ordonne de par le duc qu’on retienne quiconque tenterait de sortir. Puis, prenant avec elle cinq hommes, elle leur fait boire du punch pour leur donner du cœur au ventre, et les poste dans une galerie par où il faudra que passe Kœnigsmark. La nuit est noire, les bruits meurent. On s’endort paisiblement dans le palais : la Platen attend.

Lorsqu’au signal accoutumé, la fidèle Knesebeck a ouvert la porte, elle a témoigné une grande surprise. La princesse ne compte pas sur la visite de M. de Kœnigsmark ! Il pourrait s’arrêter, réfléchir un moment, pressentir le danger. Il monte ! On s’explique. Sophie-Dorothée n’a pas écrit le billet. Qui donc l’a écrit alors ? Et pourquoi l’a-t-on écrit ? Ils sont dans un piège, Kœnigsmark doit essayer de partir au plus vite. Non ! Qui a écrit le billet ? Cela leur est égal. Les haines qu’ils sentent autour d’eux, ils n’en ont cure. Ils pensent à autre chose. Ils s’aiment ! Knesebeck garantit qu’elle n’a pas une seconde quitté la pièce, que jamais M. de Kœnigsmark n’a causé avec tant de verve. Et le