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moritzbourg

Donc, un beau jour, elle avoue qu’elle aime Auguste. Peut-être l’aime-t-elle ? Ce n’est pas chose aisée de savoir si on aime véritablement un homme — un souverain ! — qui donne tant de bijouterie. L’extravagante générosité d’Auguste devait produire une griserie un peu analogue à celle du pillage, et peut-être éveiller d’émouvants souvenirs dans l’âme d’une Kœnigsmark. Quoi qu’il en soit, elle cède et s’en va à Moritzbourg célébrer à grand bruit ses noces illégitimes. Puis, après quinze jours, elle revient à Dresde, se fixe dans son bonheur étalé. Auguste compose la maison d’Aurore, elle mène un train royal. Toute la cour en extase se ramasse autour d’elle. Elle règne, donne, dirige, s’occupe de politique. Trop peut-être. Auguste préférait qu’on lui parlât de danses et de carrousels. Pourtant il l’aime vivement, elle est si jolie et — n’en doutons pas — si tendre ! Au bout de quelques mois, il va en Hongrie où, comme de juste, il y a des Turcs. Au retour, il est plus épris que jamais. Puis il part encore, revient encore et n’est plus épris du tout.

Pendant son absence, Aurore s’est retirée à Goslar, et l’étonnant bébé, qui sera Maurice de Saxe, entre dans le monde. Après quoi, Mme de Kœnigsmark reste fort malade. Auguste la retrouve languissante et assez misérable… Si on faisait là-dessus des recherches attentives, je crois que l’on serait étonné de voir combien est petit le nombre des souverains qui n’ont pas eu le vif dégoût de la maladie. Cela semble chez ces hauts personnages