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un voyage

choses sérieuses et tout le monde a l’humeur brusque. Le péril est grand. Pour le moins, on tuera ce gentil Sigebaud ; et Otte voudrait bien qu’on ne le tuât pas…

Sans doute, le bon évêque, se souvenant de Madeleine, commença par absoudre la gentille pécheresse. Mais cela ne suffisait nullement à sauver Sigebaud et à protéger l’imprudente. Un trésor de pitié logeait au cœur d’Emmeran et, comme vous allez voir on n’y trouvait pas trace de lâche prudence. Ayant un peu songé, il conseille à la princesse d’aller, dès qu’il sera parti, confesser sa faute à Théodon, accusant du dommage, non le trop affectueux Sigebaud, mais lui Emmeran. De la sorte, Sigebaud évitera qu’on le massacre. Peut-être aussi ce naïf évêque pensait-il que, commis par un saint, le crime paraîtrait moins grave, que Théodon se rappelant leur amitié pardonnerait. Je ne sais trop ce qu’il pensait…

Otte trouva l’idée magnifique. Emmeran était à peine à une journée de marche, elle s’en fut vers son père conter son pauvre mensonge. Mais l’évêque d’Aquitaine ne se connaissait pas bien en psychologie bavaroise. Encore que le coupable dénoncé par Otte fut un saint notoire, et un ami, tous les Théodon entrèrent aussitôt dans la plus effroyable rage. Je ne sais ce qui advint de la malheureuse Otte, rien de bon j’imagine. La laissant aux soins des autres, son frère Lauther sauta à cheval, partit au galop sur la route que suivait l’évêque, le rejoignit, lui creva les yeux, — pour s’occuper dans le