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un voyage

que, lorsqu’il ne sera plus là, l’ordre sollicite du Saint-Siège aucune bulle, aucune faveur : il y insiste passionnément. Les bienfaits vous mettent en servitude. Il ne veut nulle servitude.

Il ne souhaite pas que tous les riches se dépouillent et le suivent. Ceux qui aiment leurs entraves, qu’ils les gardent, qu’ils renoncent à la haine seulement. Il ne conseille pas à tous l’ascétisme. Quand il rencontre un homme qui porte des colombes au marché, il obtient que l’homme les lui donne, leur construit lui-même un nid et tendrement leur dit de multiplier ainsi que Dieu l’ordonne. Et ceux qui veulent vivre comme il vit, il ne permet pas qu’ils s’enferment pour jeûner et se flageller : il veut qu’ils aillent joyeusement par les chemins annoncer que l’amour guérit et sauve.

Et l’amour vient à lui, abondant. Les disciples augmentent de nombre ; bientôt il y en aura trop — beaucoup trop ! — Mais aux premiers temps quelle joyeuse vie pleine, rayonnante et gaie ! Quelles charmantes âmes claires ramassées autour de son âme ! C’est frère Jean qui l’admire si fort que non content d’imiter ses actes, il imite ses gestes ; quand François se lève, Jean se lève, il s’assied quand François s’est assis. François soupire-t-il, Jean soupire aussitôt. Et si François tousse, voilà Jean qui tousse. Il fallut gronder Jean pour qu’il se résignât à soupirer et à tousser pour son propre compte. Il y a aussi frère Léon si tendre et si fin, qui ne peut obéir quand François ordonne qu’il lui dise des injures pour le ramener à l’humilité. Il y a aussi