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COLOGNE


À peine arrivé on va, presque malgré soi, regarder le pont formidable qui enjambe le fleuve, se prolonge en rampes énormes, envahit la rue, pèse, règne. Il a un sens si évident, ce pont à l’entrée duquel, droits sur leurs chevaux, les deux empereurs semblent garder le Rhin ! Faisant taire les souvenirs de la ville pleine d’histoire, ce pont hautain, despotique, vous enseigne parmi quels gens vous voici venu… Gigantesque et magnifiquement déclamatoire, il exprime l’orgueil de l’Allemagne moderne.

L’Allemagne ancienne aimait les petites constructions. À part les églises, ses édifices publics étaient ordinairement de moyenne grandeur. Dans tout ce qui reste d’elle, on aperçoit l’attachement aux coutumes locales, le sens de la petite patrie, l’amour jaloux de la ville, un puissant esprit régional. Les chambres étroites, les plafonds bas de ses vieilles maisons, convenaient aux existences closes, discrètes, contenues par les devoirs modestes, ornées de sentiments recueillis et graves. Là-dedans, on craignait Dieu et le père de famille, on ne connaissait guère l’ambition, le besoin de nouveauté,