Page:Bunyan - Le pelerinage du chretien a la cite celeste.djvu/106

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ce qui est grand devant les hommes est en abomination devant Dieu »[1]. Puis, je me dis à moi-même : ce Honteux ne me parle que de ce que disent les hommes ; il ne me parle pas de ce que dit Dieu, ni de sa parole. Je me souvins aussi qu’au jour du jugement la sagesse et la loi du Très-Haut, et non les opinions des beaux-esprits du siècle, décideront de notre salut ou de notre perte. C’est pourquoi, pensai-je alors, je m’en tiendrai à ce que Dieu dit, quand le monde entier dirait le contraire. Puis donc que Dieu apprécie par-dessus tout la piété ; puisqu’il approuve la délicatesse de conscience ; puisque ceux qui deviennent fous pour le royaume de Dieu sont les véritables sages, et qu’un pauvre qui aime Christ est bien plus riche qu’un roi qui ne l’aime pas : Arrière de moi, Honteux, m^écriai-je, tu es l’ennemi de mon salut. Si je t’écoutais de préférence à mon souverain Seigneur, comment pourrais-je lever les yeux sur lui à sa venue[2] ? Si j’avais honte ici-bas de marcher dans ses voies et de m’associer à ses rachetés, comment pourrais-je espérer sa bénédiction ? Mais jamais il n’y eut de plus effronté coquin que ce Honteux : j’ai eu toutes les peines du monde à me débarrasser de lui ; il s’obstina à me poursuivre, me soufflant sans cesse à l’oreille une chose ou une autre sur les faiblesses des gens religieux. A la fin, je lui dis que toutes ses tentatives étaient

  1. Luc XVI, 15.
  2. Marc VIII, 38.