Page:Bunyan - Le pelerinage du chretien a la cite celeste.djvu/124

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lesquels il ne sert à rien de raisonner ; c’est pourquoi je vous souhaite le bon jour.

Chrétien s’approcha alors, et dit à son compagnon de voyage : Je vous ai bien dit que cela finirait ainsi ; vos discours heurtaient trop directement ses passions. Il a mieux aimé renoncer à votre société qu’à son mauvais train ; mais, enfin, le voilà parti ; laissez-le aller ; nous n’y perdrons rien ; il nous a épargné la peine de nous éloigner de lui : c’est un de ces hommes dont l’apôtre dit : « Sépare-toi de ces gens-là »[1].

Fidèle. Je suis pourtant bien aise que nous ayons eu cette petite conversation avec lui ; il est possible qu’il y réfléchisse quelque jour. Quoi qu’il en soit, je lui ai parlé avec une grande franchise ; s’il périt, je serai net de son sang.

Chrétien. Vous avez eu raison de lui parler si franchement ; une telle fidélité est bien rare de nos jours ; c’est parce qu’on en manque qu’on voit tant de scandales. Il y a un bon nombre de ces beaux parleurs, dont la religion est toute en paroles, et dont la conduite est légère, déréglée, et qui, prenant place parmi les fidèles, et passant pour tels, induisent les mondains en erreur, déshonorent l’Évangile, et affligent les chrétiens sincères. Je voudrais qu’on en agît avec de telles gens comme vous venez de le faire ; il en résulterait que leur vie de-

  1. 1 Tim. VI, 5.