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VENISE. PADOUE. VICENCE. VÉRONE.

vrir tout entier, avec une foule d’accessoires de même style, pouvait justement produire l’effet que la dévotion recherchait de préférence sur le tombeau du saint. Ce n’est qu’au XVe siècle que l’on acheva les coupoles jusqu’alors à peine visibles du dehors ou de formes trop simples, de manière à en faire de véritables coupoles avec tambours. Sans compter le toit éminemment laid de la coupole du milieu, toute cette restauration manque en général de sens. Les coupoles s’embarrassent l’une l’autre pour l’œil ; mais de plus elles offusquent le jour, et de loin elles forment une masse désagréable. On n’a pas même profité du seul avantage qu’elles pouvaient offrir, celui d’une lumière venant d’en haut.

Plus tard tout l’intérieur, à l’exception d’un petit nombre de chapelles, fut blanchi à la chaux et rempli de monuments modernes, sort dont Saint-Marc a été entièrement préservé. La première impression n’a rien de sacré et n’est que troublante ; les quatre cloîtres, au contraire, ont un caractère imposant par l’élévation et l’ouverture de leurs arcs ; ils semblent bâtis pour des templiers plutôt que pour des moines mendiants.

Le type de S. Maria de’ Frari est reproduit dans un certain nombre d’églises de convents, ainsi que d’églises de paroisse et de cathédrales, à Venise et aux environs. Ce qui les caractérise, ce sont les colonnes rondes ou piliers largement espacés de manière à former de grands carrés au milieu et des espaces oblongs dans les nefs latérales ; au-dessus des grands arcs ne s’élève qu’une nef supérieure d’une hauteur médiocre ; le chœur est sans pourtour ; le transept a de deux à quatre chapelles dans le mur du fond. Il faut noter comme une particularité qu’on a évité les fenêtres latérales.

S. Lorenzo [a] à Vicence est un des beaux exemplaires de ce style et un des premiers ; la façade est de même excellente, et elle a ce mérite que par elle il est permis de se représenter à peu près celle de S. Giovanni e Paolo à Venise, achevée d’après le plan primitif. (Remarquer les voûtes obliques des nefs latérales ; le but était sans doute de placer les petites fenêtres rondes aussi haut que possible, les bâtiments d’en face enlevant le jour à l’église.) — S. Corona [b] à Vicence est d’un plan analogue, mais elle est d’un caractère plus antique et basse de proportions ; du dehors la solide construction en briques avec les annexes et l’entourage offre un aspect pittoresque[1].

S. Anastasia [c] à Vérone (église de Dominicains), commencée après 1261, a une façade incrustée à moitié seulement et à une époque récente, mais elle est, pour l’ordonnance de l’intérieur, une des églises les plus belles et les plus légères en ce genre, avec un jour pur tombant d’en haut et une distribution excellente de l’ornementation intérieure. L’aspect

  1. La cathédrale [d] de Vicence au contraire avec une seule nef et des chapelles sur les deux côtés, est l’un des monuments le plus vides et le plus donnés de style du gothique italien ; la façade de marbre a une de ces incrustations en forme de matelas, telles qu’on les rencontre surtout dans l’Italie centrale. Le chœur Renaissance est de peu de valeur.