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MONUMENTS PROFANES : MILAN, BOLOGNE.

Milan possède une construction de briques unique en son genre, de la dernière époque gothique les parties anciennes de la façade du grand hôpital [a], commencée en 1456 par Antonio Filarete. Le dernier corps de bâtiment à droite est seul ancien. Au premier étage, Guiniforte Solari revint au gothique. Bramante[1] l’acheva en gothique ; puis il commença dans son propre style le côté droit de la grande cour. L’imposante reconstruction actuelle et la riche façade du milieu, qui joue le gothique, ne sont que de 1624, par Ricchini, et non par Filarete, comme on l’écrit si souvent.

L’imposant Palazzo Pubblico (« Broletto ») [a] de Côme, avec des assises, de pierres de différentes couleurs (près de la cathédrale), suit, pour le plan, le palais de Plaisance, mais dans des proportions beaucoup plus petites.

Il en est de même du palais [c] de Bergame, dont le vestibule inférieur ouvert repose sur des piliers, et à l’intérieur sur des colonnes.

Par contre, Bologne possède un certain nombre de monuments qui réunissent dans un curieux assemblage le style toscan et le style de la haute Italie. — C’est d’abord la Loggia de’ Mercanti, ou la Mercanzia [d], bel exemplaire d’une construction gothique en briques (malheureusement recouverte au badigeon dans les temps modernes) ; on la fait remonter à l’an 1294, il est probable pourtant qu’elle est d’un siècle plus jeune et peut-être même a-t-elle ressenti l’influence de la Loggia de’ Lanzi, à Florence (voir plus bas). La destination, d’ailleurs, en est très différente : ce devait être la façade d’une sorte de bourse ou d’un tribunal de commerce. — La matière invitait à construire les piliers en faisceaux de colonnes ; de là aussi la formation timide de la corniche principale. Il y a un manque sensible d’harmonie en ce que, par égard au baldaquin du centre, les fenêtres ne tombent pas au milieu des deux ogives inférieures. (Les façades latérales sont modernes.)

L’impression la plus fidèle d’une de ces grandes citadelles de famille du moyen âge est celle que produit le Palazzo Pepoli [e]], construit également en briques, dont il s’est conservé, outre les arcs gothiques des portes au riche profil, une cour avec galeries d’un côté, et corridors en encorbellement sur les trois autres côtés. Si l’on y ajoute une des gracieuses cours qui décoraient les maisons (par exemple l’ancien no 373), on aura une idée à peu près complète de l’architecture privée à Bologne au XIVe siècle. — Le gigantesque château, qui maintenant s’appelle Palazzo del Governo (autrefois Palazzo Apastolico) f], a encore par devant quelques grandes fenêtres ; la première cour repose, presque à l’ancienne manière florentine, sur des piliers octogones, avec chapiteaux à feuilles et arcs un peu moins que demi-circulaires.

Le Palazzo della Ragione [g] à Ferrare, de l’an 1326, est une curieuse

  1. Les médaillons des fenêtres représentent en partie les mêmes portraits que les médaillons de sacristie de S, Satiro.