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PREMIÈRE RENAISSANCE.

À Trévise, on attribue à Pietro Lombardo la restauration et la décoration de la cathédrale [a], basilique à trois nefs sur piliers et trois coupoles dans la nef centrale ; à Tullio : la Cappella del Sacramento [b] dans la cathédrale à droite, la Crociera [c] de l’église la Madonna delle Grazie (vers 1530), et trois chapelles avec orgue à S. Paolo [d]. — On attribue encore à Pietro la cathédrale [e] de Cividale, semblable à S. Zaccaria.

Quant aux tours, à Venise alors, comme de tout temps, l’architecte était tenu à construire une sorte de muraille épaisse, sans parties ajoutées. On savait par expérience que la tour, en dépit des fondements les plus solides, céderait de quelque manière ; aussi n’est-ce que tout en haut que l’architecte ne risquait à placer une galerie à jour avec piliers. Le reste n’était qu’un mur plein, avec les petites fenêtres indispensables. Il est curieux que la Renaissance n’ait pas malgré tout essayé une décoration extérieure, qu’elle ne soit presque partout contentée de bandes de maçonnerie et parfois d’une corniche intermédiaire. La seule tour un peu plus ornée est la tour isolée près de S. Pietro in Castello [f] (1474). Une autre, tout à fait originale, se trouve près de S. Maria dell’Orto [g]. Plus tard (1510) un certain Bartolommeo Buon le jeune, de Bergame[1]), donna au campanile de Saint-Marc [h]] son joli étage supérieur surmonté d’une flèche. — Quant à la Torre dell’Orologio [i] (1496, par Pietro Lombardo), si les ailes n’ont été vraiment ajoutées qu’après quelque trente ou quarante années, elle était jusque-là la seule tour à plusieurs étages qui eût un revêtement complet de pilastres. Parmi leu autres tours du XVIe siècle, celle qui se trouve près de S. Giorgio de’ Greci [j] est une des plus élégantes. (Elle est probablement, de même que l’église, l’œuvre de Jac. Sansovino.)

Entre les églises et les palais se placent les Scuole, c’est-à-dire les maisons des confréries. À Venise surtout, les confréries ou corporations religieuses avaient, par donations et par legs, atteint à une grande richesse, qui, alors, comme toute propriété collective, ne pouvait être déclarée de bonne prise au premier désir ou besoin de l’État. Cette richesse, tout au contraire, pouvait et devait s’étaler en plein jour. Et d’abord par la beauté de l’architecture.

La Scuola di S. Marco [k], près de S. Giovanni e Paolo, construite en 1485, a une des plus magnifiques façades de ce style. (On suppose que Martino Lombardo est l’auteur du plan, Pietro Lombardo de la décoration ; les sculptures sont moitié de Bartolommeo Buon (?), moitié de Tullio Lombardo.) À l’un des chapiteaux de la façade latérale se voit la date de 1533. À l’intérieur, la galerie du bas seule a conservé encore son ancienne forme ; des colonnes sveltes sur de hauts piédestaux

  1. « Mastro Buono » , qu’il ne faut pas confondre avec le sculpteur plus ancien, Bartolommeo Buon : « Mastro Bartolommeo » .