Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/59

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bornois à écouter dans un profond silence.

Voyant que cet entretien ne faisoit pas fortune, il se mit à parler des assemblées publiques, des concerts ; mais il ne tarda pas à s’appercevoir que je n’en avois aucune idée.

Enfin, il laissa tomber la conversation, avec une adresse infinie, sur les agrémens et les occupations de la campagne.

Pour le coup, je ne devois plus douter que son intention ne fût de me mettre à l’épreuve, et qu’il vouloit essayer s’il n’y avoit aucun moyen de me faire parler. Cette réflexion mit de nouveau mon esprit à la gêne ; j’en demeurai aux monosyllabes, et encore tâchai-je de les éviter tant que je pouvois.

Mylord Orville continuoit à donner cours à sa belle humeur, et moi je tenois toujours la tête sottement baissée. Au moment que j’y pensois le moins, ce même fat qui m’avoit demandée précédemment, s’approcha avec un air d’importance ridicule ; et, après deux ou trois grandes révérences, il dit : « Je vous demande pardon, madame, — et à vous aussi, mylord, — de ce que j’interromps un entretien aussi agréable,