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INTRODUCTION À L’HISTOIRE


possesseurs d’une grande fortune et d’une grande opulence pourront certainement continuer à vivre ; mais les pauvres, mais ceux qui ont peu de richesses, peu d’aliments, de boissons et d’autres biens, comment pourront-ils subsister ? Alors cette réflexion lui vint à l’esprit : Si je rassemblais tout ce qu’il y a de riz et d’autres moyens de subsistance dans le Djambudvîpa ; que je fisse compter et mesurer le tout ; qu’une fois cette opération achevée, établissant un grenier unique pour tout ce qu’il y a de villages, de villes, de bourgs, de chefs-lieux de district, de capitales dans le Djambudvîpa, je fisse distribuer une portion égale à chacun des hommes du Djambudvîpa ? Aussitôt le roi appela les receveurs, les grands conseillers, les ministres, les gardiens des portes et les membres des divers conseils, et leur parla ainsi : Allez, seigneurs, rassemblez tout ce qui se trouve de riz et d’autres moyens de subsistance dans le Djambudvîpa ; comptez et mesurez tout cela ; et une fois cette opération faite, établissez un grenier unique pour tout ce qu’il y a de villages, de villes, de bourgs, de chefs-lieux de district, de capitales dans le Djambudvîpa. Oui, seigneur, répondirent tous ceux que le roi avait mandés ; et aussitôt ils exécutèrent ce qui leur était ordonné. Ils se rendirent ensuite au lieu où se trouvait le roi Kanakavarṇa, et quand ils furent arrivés auprès de lui, ils lui parlèrent ainsi : Sache, ô roi, que tout ce qui se trouvait de riz et d’autres moyens de subsistance dans le Djambudvîpa a été rassemblé, compté, mesuré et déposé dans un grenier unique pour tout ce qu’il y a de villages, de villes, de bourgs, de chefs-lieux de district, de capitales dans le Djambudvîpa. Le moment fixé pour ce que le roi veut faire est maintenant venu. Alors Kanakavarṇa ayant appelé tous ceux qui savaient compter, calculer et tenir les écritures, leur parla ainsi : Allez, seigneurs, comptez tous les hommes du Djambudvîpa, et quand vous les aurez comptés, donnez-leur à chacun une portion égale de nourriture. Oui, seigneur, répondirent ceux que le roi avait mandés ; et aussitôt ils se mirent à compter les hommes du Djambudvîpa, et s’autorisant de la volonté du roi, ils assignèrent à chacun des habitants du Djambudvîpa une portion égale de nourriture. Le peuple vécut ainsi pendant onze ans ; mais il n’eut plus rien pour vivre la douzième année. À peine un mois de la douzième année se fut-il écoulé qu’un grand nombre d’hommes, de femmes et d’enfants des deux sexes moururent de faim et de soif. En ce moment tout ce qu’il y avait de riz et d’autres moyens de subsistance dans le pays se trouvait épuisé, excepté qu’il restait au roi Kanakavarṇa une seule petite mesure de nourriture.

« Cependant il vint à cette époque dans l’univers Saha[1], un Bôdhisattva

  1. Voyez, relativement à cette expression, une note que son étendue m’a forcé de rejeter à la fin du volume. Appendice no II.