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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

« Bhadanta, dit le texte ; c’est un certain Sthavira de l’école des Sûtras, ou c’est son nom même. Mais Bhagavad viçêcha a prétendu que ce titre désignait le Sthavira Dharma trâta. À cela nous répondrons à notre tour : Le Sthavira Dharma trâta soutient l’existence des choses passées et des choses futures ; il n’est ni de l’école des Sûtras, ni de celle des Similitudes. Et cependant le texte dira plus tard : Le respectable Dharma trâta croit à la diversité des existences, puisqu’il a dit : « Pour l’être qui transmigre dans les trois voies du temps, il y a diversité d’existence, et non diversité de substance. » Or le personnage qui est appelé du titre de Bhadanta est présenté par l’école de la Vibhâchâ comme se rattachant aux opinions des Sâutrântikas, ainsi qu’on le voit dans divers passages tels que le suivant : Le respectable a dit, etc. J’ajoute que le respectable Dharma trâta est cité par son nom dans des passages comme celui-ci : « Le respectable Dharma trâta a dit. » Tout cela prouve qu’ici, par Bhadanta, le texte veut désigner un personnage de l’école des Sûtras autre que Dharma trâta ; il désigne ainsi quelque Sthavira, ou quelque Religieux [dont le nom n’est pas donné][1].

Parmi les Religieux cités dans la discussion précédente, il en est un dont le nom me suggère une remarque dont l’application peut devenir de quelque intérêt ; c’est Vasumitra, le célèbre commentateur de l’Abhidharma kôça. Les Mongols, au rapport de M. Schmidt, connaissent un Vischumitra contemporain de Kanichka, roi du Kachemire, qu’ils placent trois cents ans après l’entrée du Buddha dans le Nirvâṇa ; et ils en font le chef du troisième et dernier concile, qui, selon la tradition du Nord, s’occupa du soin de rédiger les écritures sacrées, et qui admit dans le canon religieux les Dhâraṇîs ou formules magiques[2]. Klaproth, qui ne pardonne guère de semblables peccadilles quand il les découvre chez les autres, remplace le Vischumitra de M. Schmidt par Vichṇnumitra, sans avertir si Vichṇumitra est la vraie leçon des textes mongols[3]. L’orthographe que préfère Klaproth a l’avantage de donner un nom régulier, tandis que celle de Vischumitra est manifestement corrompue. Mais les transcriptions mongoles sont si négligemment exécutées, que Vischumitra pourrait bien n’être qu’une mauvaise orthographe du nom de Vasumitra. Si cette supposition venait à se vérifier, l’époque du Religieux Vasumitra se rattacherait à l’un des plus grands événements de l’histoire du Buddhisme ; c’est un point sur lequel je compte revenir dans mon esquisse historique.

Je rencontre en outre deux ou trois titres d’ouvrages dont les auteurs ne sont

  1. Abhidharma kôça vyâkhyâ, f. 32 a ; et man. Soc. Asiat., f. 36 b.
  2. Schmidt, Geschichte der Ost-Mongol, p. 17 et 315.
  3. Foe koue ki, p. 248.