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DU BUDDHISME INDIEN.

légendes relatives à Çâkya peuvent donc avoir été rassemblées par le premier concile ; mais elles doivent aussi avoir été remaniées par le second, et plus tard même quand on rédigeait celles qui se rapportent au roi Açôka. Il y a plus, elles doivent l’avoir été également par le troisième ; car j’ai déjà signalé dans le cours de mes remarques sur les Sûtras l’existence de quelques particularités qui annoncent une main plus moderne que le fond même des livres où elles se trouvent. Je ne rappellerai en ce moment que l’indication des nombreuses sectes que la tradition fait contemporaines du dernier concile, circonstance qui place les Sûtras où on la remarque bien plus bas qu’on ne devrait le faire, s’ils ne renfermaient pas cet indice de postériorité[1]. Mais ce ne peut être là qu’une interpolation, et la différence de ces traités avec ceux qu’on nomme Mahâyânas reste entière. Cette différence est telle qu’il est permis d’affirmer en toute assurance que la même assemblée n’a pu rédiger à la fois ces deux classes d’ouvrages. Autrement les conceptions qui dominent dans les Mahâyânas se seraient glissées plus souvent dans les Sûtras simples, où les traces de leur présence sont au contraire extrêmement rares.

Cela posé, si les Sûtras primitifs sont l’œuvre du premier concile, successivement remaniée par les deux conciles suivants, et si l’examen de leur contenu exclut l’idée qu’ils aient pu être rédigés en même temps que les Mahâyânas, il ne nous reste que le second et le troisième concile auxquels nous devions attribuer la compilation des Sûtras les plus développés. Il est peu probable qu’ils émanent du second ; la date de ce concile est trop rapprochée de celle de Çâkya pour que sa doctrine ait eu le temps de subir une transformation aussi considérable que celle dont témoignent les Mahâyâna sûtras. C’est donc du troisième concile qu’ils émanent ; et en effet la haute estime dont ils jouissent encore aujourd’hui dans le Nord, où ils passent, comme je l’ai dit ailleurs, pour renfermer la parole même du Buddha, est, jusqu’à un certain point, un argument en faveur de ce sentiment. J’ajoute que c’est dans ces Sûtras que se trouvent ces morceaux poétiques étendus, dont le sanscrit est si fautif, circonstance qui coïncide d’une manière tout à fait remarquable avec la tradition qui place dans le Kachemire et sous un roi d’origine étrangère la réunion et le travail du troisième concile. Ce sont là, on le voit, de simples rapprochements où le raisonnement a autant de part que les faits. J’ose dire toutefois que la suite de ces recherches doit pleinement les confirmer.

On ne peut rien dire de plus précis touchant les Tantras. Il y a cependant lieu de croire que ces livres n’ont été rédigés ni par le premier, ni par le second concile. L’ont-ils été par le troisième ? ou bien déjà répandus dans l’Inde par

  1. Csoma, Notices on the life of Shakya, dans Asiat. Res., t. XX, p. 298.