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DU BUDDHISME INDIEN.

tions. « Ce mot, disent-ils, signifie chant correspondant ou chant redoublé, c’est-à-dire qu’il répond à un texte précédent, et qu’il le répète pour en manifester le sens. Il est de six, de quatre, de trois ou de deux phrases[1]. » Cette définition s’applique exactement à ces stances que l’on rencontre dispersées dans tous les livres émanés de la prédication de Çâkya, et qui ont pour objet de résumer et de présenter, sous une forme précise, le sens d’un discours ou d’un récit. Dans les Sûtras développés (Vâipulya sûtra) dont il sera parlé plus bas, ces vers ou ces stances occupent quelquefois une place considérable, et leur nombre dépasse de beaucoup les proportions fixées par la définition chinoise ; mais leur objet est toujours le même, et il n’y a rien d’important dans la partie poétique de ces livres qui ne soit déjà dans l’exposition en prose. Je remarquerai cependant que, dans les Sûtras que je viens de citer et dont le Lotus de la bonne foi offre un modèle, ces stances sont précédées d’une formule de ce genre : « En ce moment Bhagavat (Çâkyamuni) prononça les stances suivantes, » et que ces stances sont nommées Gâthâ. Il me semble que d’après la définition chinoise nous devrions trouver ici Gêya au lieu de Gâthâ ; mais cette légère difficulté s’explique si l’on admet que Gêya est le nom générique de tout ce qui est par sa forme susceptible d’être chanté, et que le mot de Gâthâ désigne chacune des stances mêmes dont se compose le Gêya. En un mot, un Gêya peut n’être formé que d’une seule Gâthâ, comme il peut en renfermer plusieurs. Nous verrons plus bas le mot de Gâthâ employé pour désigner une classe spéciale de livres, et j’aurai alors l’occasion d’énoncer cette conjecture, que la définition donnée par la liste népâlaise du terme Gêya s’applique mieux à celui de Gâthâ. Mais quelle que soit la nuance qui les distingue l’un de l’autre, je puis dire dès à présent que le mot de Gêya serait mal compris si l’on n’y voyait que le titre d’une classe de livres comme l’est celui de Sûtra. Cela peut être, si l’on envisage collectivement tout ce qui est Gêya, abstraction faite des textes où les Gêyas se trouvent. Mais ce titre désigne, à proprement parler, un des éléments qui entrent dans la composition des livres buddhiques ; et cette observation, que nous allons voir se répéter sur le plus grand nombre des articles de la liste népalaise, est, si je ne me trompe, la seule qui nous montre cette liste sous son véritable jour.

3o « Vyâkaraṇa. Ce sont des ouvrages narratifs, contenant l’histoire des diverses naissances de Çâkya, avant qu’il devînt Nirvâṇa (ou plutôt qu’il entrât dans le Nirvâṇa), les actions diverses des autres Buddhas et Bôdhisattvas, et des formules de prières et de louanges. »

  1. Landresse, Foe koue ki, p. 321 et 322.