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LE LOTUS DE LA BONNE LOI.

la fausseté de leur esprit, la couleur de cette médecine ne leur plaît pas, non plus que son odeur ni sa saveur. Qu’ensuite ce médecin fasse cette réflexion : Mes enfants que voilà ont l’esprit faussé par l’action de ce breuvage ou de ce poison ; f. 173 a.c’est pourquoi ils ne boivent pas cette médecine, et ne me louent pas ; si je pouvais, par l’emploi de quelque moyen adroit, faire boire cette médecine à ces enfants ! Qu’alors le médecin désireux de faire boire la médecine à ses enfants à l’aide d’un moyen adroit, leur parle ainsi : Je suis vieux, ô fils de famille, avancé en âge, cassé, et la fin de mon temps approche ; puissiez-vous n’être pas malheureux, ô mes enfants ! puissiez-vous ne pas éprouver de douleur ! J’ai préparé pour vous cette grande médecine, vous pouvez la boire si vous le désirez. Que le médecin, après avoir ainsi averti ses enfants à l’aide de ce moyen adroit, et s’être retiré dans une autre partie du pays, fasse annoncer à ses enfants malades qu’il a fait son temps ; qu’en ce moment ceux-ci se lamentent extrêmement, et se livrent aux plaintes les plus vives : Il est donc mort seul, notre père, notre protecteur, celui qui nous a donné le jour, et qui était plein de compassion pour nous ; maintenant nous voilà sans protecteur. Qu’alors ces enfants se voyant sans protecteur, se voyant sans refuge, soient incessamment en proie au chagrin, et que, par suite de ce chagrin incessant, leurs idées de fausses qu’elles étaient deviennent justes, et que ce médicament qui avait de la couleur, de l’odeur et du goût, soit reconnu par eux comme ayant en effet ces qualités ; qu’en conséquence, ils le prennent alors, f. 173 b.et que l’ayant pris, ils soient délivrés de leur mal. Qu’ensuite le médecin sachant que ses enfants sont délivrés de leur mal, se montre de nouveau à eux. Comment comprenez-vous cela, ô fils de famille. Y a-t-il en quoi que ce soit mensonge de la part de ce médecin à employer ce moyen adroit ? Les Bôdhisattvas répondirent : Non, il n’y a pas mensonge, Bhagavat ; il n’y a pas mensonge, Sugata. Bhagavat reprit : De la même manière, ô fils de famille, il y a un nombre immense, incalculable, de centaines de mille de milliers de kôṭis de Kalpas, que je suis parvenu à l’état suprême de Buddha parfaitement accompli ; mais je développe de temps en temps, aux yeux des créatures, des moyens de cette espèce, dont je possède l’emploi habile, dans le dessein de les convertir, et il n’y a là, de ma part, mensonge en aucune manière.

Ensuite Bhagavat voulant exposer ce sujet avec plus de développement, prononça, dans cette occasion, les stances suivantes :