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APPENDICE. — No I.

vingt Religieux sont nécessaires pour constituer un Sam̃gha légal, mais que cinq suffisent dans les cas extraordinaires[1].

Il ne paraît cependant pas que ce soit là le minimum, au moins d’après Turnour ; car dans une de ses traductions du commentaire de Buddhaghôsa, il parle de deux sortes d’Assemblées nommées l’une Sam̃gha kamma, l’autre Gaṇa kamma, et il définit la première « une réunion de Religieux rassemblés pour accomplir un acte ou une cérémonie quelconque, et qui dépasse le nombre de cinq, » tandis que le Gaṇa kamma est une réunion de Religieux au-dessous de cinq[2]. Si pour « les actes d’une troupe, » Gaṇa kamma, les Religieux peuvent encore se réunir moins de cinq, ce dernier chiffre n’est pas le minimum. Une connaissance plus approfondie des textes relatifs à la discipline peut seule résoudre la difficulté. C’est dans ces ouvrages qu’on apprendra tout ce qui concerne la forme, la composition et la tenue des Assemblées dites Sam̃gha. On comprend que suivant la nature des objets que se proposaient ces réunions, il a pu exister des différences dans le nombre et la qualité des Religieux réunis. Ainsi, pour en donner ici un exemple, je trouve dans la glose barmane du Pâtimôkkha pâli, glose qui, si elle n’est pas la traduction d’un commentaire primitivement écrit en pâli (ce qui cependant me paraît plus que probable), se réfère néanmoins constamment aux meilleures autorités et notamment au Visuddhi magga et aux Atthakathâs, je trouve, dis-je, qu’une « Assemblée parfaite, » paramattha sam̃gha, est composée de huit Religieux, savoir, de quatre Religieux marchant dans la voie des Arhats, et de quatre autres déjà parvenus aux fruits de cet état supérieur[3].

Il se peut aussi que le terme de gaṇa soit pris dans deux ou plusieurs acceptions différentes. Nous venons de voir, d’après Turnour, que gaṇa paraît désigner une réunion de Religieux au-dessous de cinq. Ce n’est cependant pas à un nombre aussi restreint que fait penser le mot gaṇa qui, dans l’Amarakocha, est synonyme de termes signifiant « troupe, multitude[4]. » L’idée d’un petit nombre de Religieux n’est pas davantage dans le terme de gaṇâtchâiya, « précepteur d’une troupe, » épithète de ces Bôdhisattvas fabuleux que notre Lotus de la bonne loi représente venant assister à l’Assemblée de Çâkya[5]. Il est bien évident que quand on nomme ces Bôdhisattvas « précepteurs d'une troupe, » on n’a pas voulu dire que cette troupe se composait de moins de cinq Religieux : l’exagération même de la description du Lotus prouve bien plutôt qu’on a voulu laisser à gaṇa sa signification ordinaire. Au reste, il n’est pas sans intérêt de retrouver ce titre de gaṇâtchârya sur un des monuments qui attestent de la manière la plus évidente la prédominance du Buddhisme dans les provinces occidentales de l’Inde, pendant les derniers siècles avant et les premiers siècles après notre ère. Je veux parler d’une de ces inscriptions en pâli qu’on a découvertes à l’entrée ou dans l’intérieur des grottes et des cavernes creusées de main d’homme dans diverses localités de ces provinces, et notamment à Djunîr. Celle

  1. The ritual of the Buddhist Priesthood, p. 7 et 8, dans Miscell. translat. t. ii, no 4.
  2. Turnour, Examin. of Pâli Buddhistical Annals, no 2, dans Journ. asiat. Soc. of Bengal, t. VI, 2e part. p. 732, aux notes.
  3. Pâtimôkkha, f. 2 a, man. pâli-barman de la Bibl. nat. et p. 3 de ma copie.
  4. Amarakocha, l. ii, chap. v, st. 39 et 40 ; Loiseleur, p. 124.
  5. Chap. xiv, f. 159 b, ci-dessus, p. 181.