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APPENDICE. — N° VIII.

Aux caractères qui portent sur les yeux, le Vocabulaire pentaglotte en ajoute un autre sous le n° 64, qui est ainsi conçu : tchitapakchmâpadjmô. Cet énoncé serait bien obscur, sans la comparaison qu’on en peut faire avec le n" 62 de la liste népalaise, tchitrapakchmatâ, « la qualité d’avoir de beaux cils. » On voit combien est fautive l’orthographe du Vocabulaire pentaglotte ; la fin du mot padjmô offre cette singularité, qu’elle semble être la répétition du terme précédent pakchmâ, qui seul est correct ; on remettrait donc toutes choses en ordre en lisant tchitrapakchmâ, sans padjmô. La liste singhalaise nous fournit, sous le n° 45, un caractère analogue qui est ainsi conçu : akuñtchitaggapakhumatâ, « la qualité d’avoir des cils dont l’extrémité n’est pas recourbée, » c’est-à-dire, des cils droits ; c’est, en d’autres mots et avec un peu plus de détails, ce que les deux autres listes nomment de beaux cils.

Je rappelle seulement pour mémoire l’énoncé du Vocabulaire pentaglotte placé sous le n° 67, çlakchṇabhirâh, « il a les sourcils minces, » parce que j’en ai parlé plus haut dans le résumé qui termine le n° 63 du Lalita vistara ; j’ai montré que cet attribut devait se trouver sous le n° 65 de la liste népalaise, et qu’il paraissait réellement sous le n° 53 des Singhalais.

Le Vocabulaire pentaglotte a trois articles sur la perfection des oreilles qui méritent d’être remarqués ; le premier, qui porte le n° 69, est ainsi conçu : pînâyatakarṇaḥ, « il a les oreilles pleines et grandes. » Ce caractère ne se retrouve que dans une seule de nos autres listes, celle des Singhalais, sous le n° 47, âyatarutchirakaṇṇatâ, « la qualité d’avoir « les oreilles grandes et belles. » On a lieu d’être surpris de ce que ce caractère, qui répond si bien à l’apparence que présentent les oreilles sur les statues et les dessins figurés des Buddhas, ne soit pas plus unanimement reproduit par nos listes. Serait-ce que cette particularité qui nous frappe tellement qu’elle nous semble être une monstruosité, aurait été omise par les premiers rédacteurs de nos listes à cause de sa vulgarité même, et parce qu’elle leur aurait paru trop ordinaire pour constituer un caractère distinctif ? Ou bien serait-ce que les oreilles n’auraient pas été dans le principe aussi développées qu’elles le sont devenues depuis, surtout chez les Tibétains et les Mongols, et que le caractère qui nous occupe aurait été ajouté plus tard à la liste qui primitivement ne le connaissait pas ? Ce sont là deux explications entre lesquelles il serait quant à présent malaisé de se prononcer. Je dois cependant remarquer que sur les images du Buddha, dessinées et publiées par M. J. Bird, d’après des originaux découverts dans les cavernes de l’ouest de l’Inde, le développement des oreilles n’a rien de trop exagéré, et que quand on y trouve un Buddha avec des «oreilles pendantes, il est facile de reconnaître la présence d’un anneau très-volumineux qui est la véritable cause de ce développement apparent[1]. En attendant qu’un plus grand nombre de listes nous permette de nous décider sur ce point, je constate que le caractère relatif à l’allongement des oreilles n’est donné que par le Vocabulaire pentaglotte et la liste singhalaise.

  1. J. Bird, Historical Researches on the Origin and principles of the Bauddha and Jaina religions, illustrated by descriptive accounts of the sculptures in the Caves of western India, with translations of the inscriptions from Kanari, Karli, Ajanta, Ellora, Nasik. etc. pl. I, II, III, VI, VII, VIII ; Bombay, 1847, in-folio.