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APPENDICE. — No XIII.

telle, prononce pour la dernière fois sa grande maxime philosophique, « tous les composés sont périssables, » les livres pâlis de Ceylan nous le montrent passant une première fois par tous les degrés du Dhyâna, puis expirant, dans le second effort qu’il fait pour les franchir de nouveau, entre le premier et le quatrième[1].

Une doctrine qui occupe une place aussi importante dans la vie de Çâkya et par suite dans la croyance qui se rattache à son nom, ne pouvait échapper aux savants qui se sont occupés jusqu’ici du Buddhisme, d’après des ouvrages la plus part étrangers à l’Inde, mais plus ou moins fidèlement calqués sur les livres originaux. I. J. Schmidt et A. Rémusat, que la curiosité et la pénétration naturelles de leur esprit portaient à rechercher ce qu’était au fond la philosophie du Buddhisme, en ont parlé plus d’une fois, l’un d’après les livres mongols, l’autre d’après les auteurs chinois. C’est également à ces dernières sources qu’est emprunté ce que Deshauterayes nous apprend des quatre degrés du Dhyâna et particulièrement des étages ou mondes imaginaires qu’on suppose accessibles seulement à ceux qui ont atteint au terme le plus élevé de la contemplation. Mais nulle part ces auteurs n’ont traité en détail ce point de doctrine auquel les Buddhistes attachent tant de prix, et c’est jusqu’ici dans le Lalita vistara des Népalais et le Sâmaññaphala sutta de Ceylan que j’en ai trouvé l’exposition, je ne dirai pas la plus claire, mais du moins la plus complète.

Je vais donc commencer par reproduire dans une traduction que je tâcherai de rendre littérale l’exposition du Lalita vistara, d’après le texte sanscrit de cet ouvrage. Je la rapprocherai des énoncés du Sâmaññaphala pâli que j’ai traduit plus haut[2], pour contrôler et expliquer l’une par l’autre l’exposition du Lalita et celle du Sâmañña. Je me servirai de temps en temps de l’exposition tibétaine, telle que nous l’a fait connaître la traduction française de M. Foucaux, pour signaler les divergences, qu’elle présente avec la version que j’ai exécutée d’après le sanscrit. Je passerai ensuite à ce que nous ont appris, touchant cette doctrine, les auteurs européens cités tout à l’heure ; les originaux ont de droit le pas sur leurs interprètes.

Le Lalita vistara, au commencement du chapitre xi, nous représente le jeune Siddhârthaqui, après avoir visité, avec d’autres enfants de son âge, un village d’agriculteurs, est entré dans un bois qui se trouve au delà des champs cultivés, et s’est assis pour méditer à l’ombre d’un arbre Djambou.

« Là, continue le texte, il fixa son esprit sur un seul point, et l’ayant ainsi fixé, il atteignit à la première contemplation, qui est le plaisir de la satisfaction né de la distinction et accompagné de raisonnement et de jugement, détaché des désirs, détaché des conditions du péché et du vice, et il s’y arrêta.

« Après avoir, par la suppression de ce qui est accompagné de raisonnement et de jugement, par le calme intérieur, par le rappel de son esprit à l’unité, après avoir, dis-je, atteint à la seconde contemplation, qui est le plaisir de la satisfaction né de la méditation et affranchi du raisonnement et du jugement, il s’y arrêta.

  1. Turnour, Examin. of pâli Buddh. Annals, dans Journ. as. Soc. of Bengal, t. VII, 2e part., p. 1008.
  2. Ci-dessus, p. 474.