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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/192

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marchâtes sur le pied. L’autre chose dont je me doute est plus dangereuse. Nous avions remarqué, Madame et moi, que Monsieur ne manquoit jamais de tremper presque toute sa main dans l’eau bénite qui est dans la chapelle du Palais-Royal, et de s’essuyer à son mouchoir après s’en être mis au visage. Cela nous servit à lui faire une malice pour nous venger de sa mauvaise humeur, car il nous avoit rompu une partie de promenade le jour auparavant. Nous prîmes notre temps un matin qu’il étoit à Saint-Cloud, pour ne revenir que le soir. Ce même matin je me trouvai à la messe dans la chapelle du Palais-Royal, et, après que tout le monde se fut retiré, étant demeuré seul avec Madame et Montalais, comme si nous eussions eu quelque chose à nous dire [1], elles sortirent toutes deux. Je tirai de ma poche une petite bouteille pleine d’encre et un paquet de noir à noircir et le jetai dans le bénitier, en sorte que le lendemain matin, quand Monsieur eut entendu la messe, après que tout le monde se fut retiré, il ne manqua pas, en prenant de l’eau bénite, de se noircir toute la main et le front. Cela passa assez doucement, parcequ’on ne pouvoit soupçonner qui avoit fait cette malice. Son visage ressembloit quasi à un ramoneur de cheminée. Ces deux actions ne me rendent pas beaucoup coupable, puisque la première n’a pu être observée, et que la seconde n’est sue que de Madame et de moi. Cependant, me dit-il, il faut que je

  1. Dans les éditions imprimées, après ce mot on trouve : « Nous exécutâmes ce que nous avions résolu. » — Le récit est inachevé ; nous avons pu le compléter à l’aide d’un manuscrit du temps qui nous a été communiqué.