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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/240

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pas que les soupirs ne sont pas moins les effets de la crainte que de la joie et du désir. Ainsi un cœur qui pousse des soupirs embarrasse fort un esprit à en faire la différence pour savoir connoître leur véritable cause ; car je n’en ai jamais ouï que d’une même façon et sur un même ton. — Je vois bien, Mademoiselle, dit monsieur de Lauzun, que Votre Altesse Royale veut se divertir ; mais enfin que répond-elle à ma demande ? — Vous seriez bien trompé dans votre attente, interrompit la princesse, si c’étoit le refus. Mais, puisque je me suis engagée, je veux vous tenir ma parole ; je vous assure que je vous la tiendrai ponctuellement, et je vous dirai au vrai celui que j’aimerois le plus de tous ceux que je croirois pouvoir aspirer à moi. — Mais quand sera-ce, Mademoiselle ? répondit monsieur de Lauzun avec un transport et un empressement inconcevables. »

La princesse, qui en devinoit sans doute la cause, quoiqu’elle ne le témoignât pas ouvertement, et qui même faisoit paroître au dehors une partie de la joie qu’elle en avoit au fond du cœur, lui dit, toujours en souriant, que ce seroit dans trois mois. — « Ha ! Mademoiselle, que ce temps va être long pour moi, repartit notre amant, et qu’il va mettre ma patience à une rude épreuve ! Mais n’importe, continua-t-il, il faut attendre, puisque Votre Altesse Royale le veut. »

Voilà le premier progrès de ce moyen qu’il a inventé pour savoir si c’étoit tout de bon qu’il devoit espérer ou non. Vous en verrez la fin par la suite et par l’effet qui succéda.

Peu de temps après l’on parla du voyage de