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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/242

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monde le plus fin que l’on voie dans tout son sexe. Comme il n’est point de plus fâcheux obstacle à un amant qui veut s’établir dans l’esprit de l’objet qu’il aime que l’éloignement et la privation de la vue, cette absence et cet éloignement sont beaucoup plus à craindre lorsqu’on a quelque heureux commencement, parce qu’il n’est pas seulement besoin de s’insinuer dans un cœur que l’on veut réduire entièrement, mais encore il est nécessaire de ne point lâcher prise que l’on ne s’en voie absolument le maître. Nous en avons même vu qui avoient tous les avantages et qui se les conservoient par leur patience ; aussi leur est-il arrivé que, de paisibles possesseurs qu’ils étoient, par ce moyen ils ont perdu et l’objet et les espérances, et souvent même le souvenir, pour s’être absentés. M. le comte de Lauzun avoit trop de prévoyance pour ignorer toutes ces choses, et il avoit témoigné trop de conduite jusques à cet endroit, pour en manquer à l’avenir ; aussi trouva-t-il le secret d’éviter un si funeste et dangereux accident.

Notre incomparable amant voyant donc qu’il étoit obligé de suivre le Roi partout où il iroit, et par conséquent contraint de quitter son entreprise, qu’il voyoit déjà si avancée, s’avisa de faire en sorte que Mademoiselle fît le voyage avec la Cour : c’est le voyage de Flandres que le roi fit en 1671 [1] ; et, pour cet effet, il se servit de deux moyens qu’il tenoit pour assurés, comme il arriva. Le premier moyen dont il se servit fut

  1. Il s’agit ici du voyage que fit en effet le Roi en 1671, pour aller visiter ses nouvelles conquêtes.