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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/274

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de grâce, souffrez, Mademoiselle, que je me plaigne de l’excès de votre bonté, et que je lui dise que je serois beaucoup plus heureux si je l’étois moins, parce que je goûterois ma fortune avec toute sa douceur, si elle étoit médiocre, au lieu que je me vois accablé sous le poids de celle que Votre Altesse Royale m’offre, tant elle est au-dessus de moi et de mes espérances. Et comme je n’ai rien que de vous, agréez, s’il vous plaît, le vœu solennel que je fais à Votre Altesse Royale de tous les moments de ma vie. Le don que je vous fais est peu de chose en comparaison de ce que j’en ai reçu, mais il est sincère, et l’exactitude avec laquelle j’exécuterai ma promesse persuadera Votre Altesse Royale et ne laissera, jamais le moindre doute sur ce sujet. »

Vous voyez quel admirable progrès en si peu de temps M. de Lauzun avoit fait sur l’esprit de Mademoiselle ; non seulement il avoit lieu d’espérer, mais encore il n’avoit rien à craindre, puisqu’il avoit obligé cette princesse à se déclarer d’une manière qui surpassoit de beaucoup toutes ses espérances. De façon que, se voyant entièrement assuré de ce côté, et ne pouvant plus douter qu’il ne fût véritablement aimé de Mademoiselle après la déclaration tendre et sincère qu’il en avoit ouï de la propre bouche de cette princesse, il ne songea plus qu’à avoir l’agrément du Roi, sans quoi il lui étoit impossible de pouvoir rien conclure. L’occasion s’en présenta peu de temps après, ou pour mieux dire il la fit naître lui-même, voyant qu’il ne manquoit plus que cela à son entier bonheur.

Il étoit un jour auprès du Roi, où, après avoir