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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/282

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qu’à épouser ; et M. de Lauzun avoit la dispense de M. l’archevêque en sa poche, et la parole du Roi. Ce qui étoit si assuré pour lui, il ne le remettoit qu’afin de faire cette cérémonie avec plus d’éclat et de pompe ; de manière que, cela ayant éclaté ouvertement [1], les princes et les princesses du

    dessein secret jusqu’à ce que vous soyez bien déterminée. Bien des gens s’en doutent ; les ministres m’en ont parlé ; M. de Lauzun a des ennemis : prenez là-dessus vos mesures. » Je lui répondis : « Sire, votre Majesté est pour nous, personne ne sauroit nous nuire. » (Mém., 6, 156 et suiv.)

    Le secret de ce mariage, exactement gardé par Lauzun et par Mademoiselle, avoit été surpris par Guilloire, secrétaire des commandements de cette princesse, et il en avoit averti M. de Louvois. Lauzun avoit su cette indiscrétion et l’avoit apprise à Mademoiselle, qui ne consentit à garder Guilloire auprès d’elle que sur l’avis formel du comte. Guilloire, au dire de Segrais, avoit même entretenu Mademoiselle à ce sujet. « M. Guilloire, dit Segrais qui parloit plus librement que moi à Mademoiselle, par la confiance que sa charge lui donnoit auprès d’elle, lui dit tout ce qu’un véritable zèle pouvoit lui faire dire là-dessus ; et un jour, étant dans l’antichambre, je l’entendis lui dire dans sa chambre, assez haut, en lui parlant : « Vous êtes la risée et l’opprobre de toute l’Europe. » (Mém. anecd. de Segrais, œuvres, 1755, 2 vol in-18, t. 1, p. 79 et suiv.)

  1. La nouvelle de ce mariage, dont le projet avoit été tenu si secret jusque-là, éclata vite. On connoît la fameuse lettre adressée à M. de Coulanges à ce sujet, le lundi 15 décembre 1670, par Mme de Sévigné : « Je m’en vais vous mander la chose la plus étonnante…, etc. »
    Le jeudi 18 décembre, Mme de Sévigné alla complimenter mademoiselle de Montpensier : « Ce même jeudi, j’allai dès neuf heures du matin chez Mademoiselle, ayant eu avis qu’elle alloit se marier à la campagne, et que le coadjuteur de Reims (Charles-Maurice Le Tellier) faisoit la cérémonie. Cela étoit ainsi résolu le mercredi au soir, car pour le Louvre cela fut changé dès le mardi. » (Cf. Segrais, œuvres, 1755, 2 vol in-18, t. 1, p. 80.) — « Mademoiselle écrivoit ; elle me fit entrer, elle acheva sa lettre, et puis, comme elle étoit au lit, elle me fit mettre à genoux dans sa ruelle…; elle me conta une conversation