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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/315

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et que, s’il pouvoit brouiller le chevalier de Fosseuse avec elle, il la trouveroit peut-être moins rigoureuse.

Il communiqua sa pensée à Bonneville, qui lui dit que, connoissant l’humeur et la délicatesse de sa maîtresse, elle croyoit qu’il n’y avoit point de moyen plus sûr pour y réussir que de la faire douter de la fidélité du chevalier de Fosseuse.

Après avoir cherché longtemps des biais pour exécuter ce dessein, ils résolurent de se servir du portrait d’une personne assez belle que le baron de Villefranche avoit aimée, et de le faire trouver par madame de Bagneux.

Cet artifice réussit ainsi qu’ils avoient souhaité. Peu de jours après, le chevalier de Fosseuse obtint de madame de Bagneux de la voir chez elle. Sitôt qu’il fut sorti, elle trouva à l’endroit où ils avoient été ce portrait, que Bonneville y avoit mis adroitement.

Elle entra d’abord dans une défiance terrible, et ouvrit la boîte où étoit ce portrait ; mais elle ne douta plus du crime du chevalier de Fosseuse lorsqu’elle y aperçut la peinture d’une personne jeune et bien faite. Elle pensa mourir de regret d’avoir pu aimer un homme qui lui faisoit une si grande infidélité. Il lui avoit donné mille marques de son amour qui ne lui parurent plus que des tromperies, et elle prit la résolution de ne le revoir jamais.

C’étoit vers le carnaval. Le lendemain, le chevalier de Fosseuse s’étant trouvé déguisé à un bal où elle étoit, il voulut lui parler. « Si je croyois tout mon ressentiment, lui dit-elle pleine de