Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/110

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Vers sur un Baiser.

ais que je vive, ô ma seule Déesse !
Fais que je vive, et change ma tristesse
En plaisirs gracieux.
Change ma mort en immortelle vie,
Et fais, cher cœur, que mon âme ravie
S’envole avec les Dieux.
Fais que je vive, et fais qu’en la même heure
Que je te baise, entre tes bras je meure,
Languissant doucement ;
Puis, qu’aussi-tôt doucement je revive,
Pour amortir la flamme ardente et vive
Qui me va consumant.
Fais que mon âme à la tienne s’assemble ;
Range nos cœurs et nos esprits ensemble
Sous une même loi.
Qu’à mon désir ton désir se rapporte ;
Vis dedans moi, comme en la même sorte
Je vivrai dedans toi.
Ne me défens ni le sein, ni la bouche :
Permets, mon cœur, qu’à mon gré je les touche
Et baise incessamment,
Et ces yeux, où l’amour se retire ;
Car tu n’as rien qui tien se puisse dire,
Ni moi pareillement.
Mes yeux sont tiens ; des tiens je suis le maître.
Mon cœur est tien, à moi le tien doit être,
Amour l’entend ainsi.
Tu es mon feu, je dois être ta flamme ;
Tu dois encor, puisque je suis ton âme,
Etre la mienne aussi.
Embrasse-moi d’une longue embrassée ;