Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/310

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sans doute une grande délicatesse pour un homme qui n’avoit pas la réputation d’en avoir beaucoup sur ce qui le regardoit lui-même ; aussi n’en crut-elle que ce qu’il en falloit croire, c’est-à-dire qu’elle s’imagina justement, comme c’étoit la vérité, qu’il étoit amoureux de sa sœur, et que la jalousie lui avoit fait faire cet effort de faire semblant de se battre. Cela ne plut pas à son mari, qui vouloit qu’elle se gendarmât contre Beuvron de ce qu’il lui étoit infidèle, et qu’elle en fût aussi jalouse qu’un autre ; mais elle croyoit que son mari avoit pris l’alarme mal à propos, et ce qui la confirmoit dans cette opinion, c’est qu’elle avoit donné ordre elle-même à Beuvron, comme nous avons dit, de voir sa sœur en particulier, ce qu’elle croyoit être cause de tout ce désordre.

Tout cela se passa dans la grande jeunesse du Roi, et il n’avoit encore paru que peu de chose de ses belles qualités, et pour l’amour, et pour la guerre. Cependant, comme il avoit toutes les inclinations d’un grand prince, ces deux sœurs furent celles de sa cour qu’il estima le moins, et il ne put s’empêcher de dire un jour, en parlant de la comtesse d’Olonne, qu’elle faisoit honte à son sexe, et que sa sœur prenoit le chemin de ne valoir pas mieux. En effet, ayant trouvé son mari beaucoup plus traitable à son retour qu’elle n’espéroit, elle ne s’en tint pas au marquis de Beuvron, et lui associa bientôt plusieurs camarades de toutes sortes de qualités. L’église, la robe et l’épée furent également bien reçues chez elle, et, non contente de trois États, il y en eut encore un quatrième qui fut encore son favori.