Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/352

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avoit fait ; qu’à son âge, il n’étoit pas à savoir que rien ne le pouvoit dispenser du respect qu’il lui devoit ; qu’aussi croyoit-il que cela ne lui étoit arrivé qu’après être soûl, autrement qu’il ne sauroit qu’en dire.

Il y avoit apparence que le duc de La Ferté alloit chercher quelque excuse pour colorer une si grande faute, et même qu’en ayant la dernière confusion, il prendroit le parti de la nier ; mais, sans s’en s’étonner aucunement : « Il est vrai, lui répondit-il, j’étois soûl, et c’est de quoi elle a été fort heureuse, car sans cela je lui aurois bien dit d’autres vérités… J’ai une liste fidèle de tous les tours qu’elle a faits ; et, jusqu’au collier de perles qu’elle a fait escroquer à monsieur de Dreux[1], conseiller au grand Conseil, par le chevalier de Lignerac[2], rien ne m’est inconnu. » Le comte lui demanda s’il n’avoit point de honte de parler comme cela de sa mère ; mais, quelque réprimande qu’il lui fît, il lui fut impossible de lui faire entendre raison.

Comme il ne se passe guère de choses dans le royaume que le Roi ne sache, on lui donna bientôt le divertissement de cette comédie, qui lui inspira un si grand mépris pour cette maison, qu’il ne se put empêcher de le montrer. Mais le duc de La Ferté, qui savoit bien qu’il étoit déjà perdu de réputation auprès de lui, ne s’en mit guère en peine, non plus que la maréchale, laquelle continue toujours à mener la même vie ;

  1. Joachim de Dreux étoit conseiller au Grand Conseil depuis l’année 1681. Il étoit docteur de Sorbonne et avoit été chanoine de l’Église de Paris.
  2. Voy. ci-dessus, et t. 2, p. 420.