Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/46

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La porte de l’ouïe et celle de la vue
Lui parurent foibles d’abord ;
Mais sur ce point l’Amour se trompa fort,
Car la place étoit bien pourvue.
Les assiégés à tous momens
L’incommodoient dans ses retranchemens ;
Et, quoiqu’il fît toutes choses possibles,
Ils étoient toujours invincibles ;
Ils regardoient avec indignité
L’Espérance et la Propreté ;
Ils se moquoient de la Tendresse[1],
Ils repoussoient la Hardiesse,
Et sans relâche ils s’opposoient
A ce que les autres faisoient.
Encor que l’Amour soit habile,
Et qu’il puisse achever tout ce qu’il entreprend,
Il vit bien qu’il est difficile
De prendre un cœur que la Vertu défend.
Ces guerrières pourtant, quoiqu’alors malheureuses,
Faisoient leur devoir constamment ;
L’Inquiétude seulement,
Par façons séditieuses,
Les troubloit indirectement ;
Son humeur toujours inconstante,
A qui tout plaît et que rien ne contente,
Donnoit de la peine à l’Amour ;
De tout ce qu’on faisoit elle étoit offensée,
Il ne se passoit point de jour
Qu’elle ne changeât de pensée.
Quant à la Jalousie, elle étoit sans emploi,

  1. Conduite de Madame de F. T.