Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/83

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demeuré quelque temps, et ne voyant pas de jour d’en sortir, il s’avisa de cajoler la fille du geôlier, et lui promit de l’épouser si elle vouloit faciliter son évasion[1]. Cette fille, plus amoureuse que fidèle à son père, écouta les propositions du

    plus haut, en 1611 ; mais dès le lendemain il avoit satisfait, et son créancier, Samuel de Bechilon, sieur d’Erlaut, et le sergent Mathieu Goujon, et il étoit relaxé (8 juin). Quant à ses opinions religieuses, écoutons son père : « Rien ne pouvant satisfaire à l’insolence d’un esprit perdu, il se jeta à la cour, où il perdit au jeu vingt fois ce qu’il avoit vaillant, et à cela ne trouve remède que de renoncer sa religion. Le père, adverty de sa grand frequentation avec les jesuistes, luy deffendist par lettres telle compaignie. Il respondit qu’à la verité il entretenoit le père Arnou et Dumets. Le vieillard répliqua que ces deux noms lui faisoient peur… Constant se trouva en peu de temps en exsecration à tous les siens, et en horreur et mespris à ceux qui le servoient… Il fit parler à son pere de reconciliation. Il vint à Genesve, se presenta au ministre, fit là, en Poictou et à Paris, toutes les reconnoissances qui lui furent enjointes, obtint une pension et de l’argent… »—Enfin, quant à ses satires, on voit aussi par les mémoires de son père que du vivant de celui-ci il « escrivit en prose et en vers furieusement contre la papauté ». (Mémoires, éd. Lud. Lalanne, p. 152 et suiv.) De plus, le P. Laguille (Variétés histor. et littér., t. 8, initio) affirme que Constant d’Aubigné, « se melant de poësie, composa une satire contre le duc d’Epernon », gouverneur de Bordeaux, qui avoit refusé de l’employer. « La pièce ou la nouvelle en ayant été portée au duc, celui-ci fit enlever d’Aubigné et ordonna qu’on le conduisît dans son château de Cadillac. »

  1. Ce fait est confirmé par le P. Laguille. La note 62, p. 70, montre que le prétendu geôlier de Constant d’Aubigné n’étoit autre qu’un gentilhomme d’une bonne noblesse, et noblement allié, lieutenant du gouverneur de la province.—Le mariage auroit été célébré en 1627. Cette date est assez peu probable, puisque Agrippa d’Aubigné, dans son testament, qui est du 24 avril 1630, ne parle pas de cette seconde femme de son fils et ne fait aucune allusion à son mariage.