Page:Côté - Bleu, blanc, rouge, 1903.djvu/128

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des oiseaux dans la feuillée, les cris des enfants courant après un papillon. Dans l’air volent de grandes balançoires, qui montent et descendent, scandées par le rire et les oh !… admiratifs des petits. Plus loin, une oscillation de gens plantés sur les deux jambes, bouche béante : c’est « le massacre des innocents. » De grands enfants éprouvent le besoin de jouer avec des poupées ! On attend à la file le moment de tirer. L’amorce posée, on épaule le fusil, les coudes relevés, un œil fermé : la capsule éclate. Des pétardements secs, ininterrompus, s’ajoutent aux criailleries des gamins. Puis, tout à coup, un orgue jette dans l’air ses notes sonores. Étrange musique, qui grince avec des fioritures de flûte, piaulant sur une basse de tambourin et de trombone, roulant et grondant constamment.

Allons voir le carrousel, cette maison qui tourne, perdue dans les grands arbres… C’est peut-être le château de la Fée ! Oh ! la jolie chose de voir tous ces bambins caracoler sur des chevaux à l’air féroce ressemblant plutôt à des monstres mythologiques ! Les garçonnets sont tout pâles de plaisir. Songez donc, tenir par la bride un vrai cheval ! Les bébés radieux ouvrent tout grands leurs yeux, où rient la surprise et l’admiration. Les fillettes envoient des baisers aux parents grisés, eux aussi, par le souffle de la Fée Bonheur. Mais, sauvons-nous, les cinq minutes vont expirer, le mouvement du carrousel, se ralentit. Que de bébés feront la lippe, lorsqu’on les arrachera de ces chevaux où ils se tiennent cramponnés !

Des essaims de fillettes en robes bleues, roses, blanches, passent bras-dessus bras-dessous, occupant la largeur de l’allée, dont le gravier craque sous leurs pas d’oiseaux. Elles jettent hardiment de leurs lèvres rouges