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ASILE SAINT-JEAN DE DIEU



COMME elles semblent tristes et désolées ces petites maisons grises qui s’estompent sur un ciel de turquoise dont le satin se déroule uniformément sans aucune tache. Seule, une tourelle en brique rouge égaie la sévérité claustrale de ces caveaux en pierre où sourient, dans leur pâle inconscience, des morts étranges qui parlent et gesticulent, prisonniers de leur chair dans ces froids tombeaux, pendant que leur âme voyage en des pays bleus, gris ou roses, inconnus et mystérieux. Une large prairie s’étale à l’infini comme un immense tapis de velours vert. Au loin, le beau fleuve, lui aussi murmure sa folle chanson. Le même fleuve qui pleure à Caughnauwaga, batifole à l’Île Sainte-Hélène, jacasse au Marché Bonsecours, sourit à Boucherville, le beau fleuve que j’aime et dont je ne puis me lasser de redire les attraits charmeurs.

On a chanté sur tous les tons le Jourdain, le Nil, le Rhin, la Seine, qui n’étaient certes pas dignes de dénouer la ceinture d’algues du majestueux Saint-Laurent, orgueil de la patrie ! Avaient-ils comme le nôtre ce mouvement