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Page:Côté - La Terre ancestrale, 1933.djvu/54

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la terre ancestrale

laissât le cheval dehors. Dans la salle d’attente, les habitués étaient rendus : vieux rentiers, fainéants, simples désœuvrés, une dizaine de ces gens assistaient régulièrement au passage de tous les convois. La station était leur cercle. Si l’un était en retard, vous le voyiez arriver au pas de course comme à un important rendez-vous. Sitôt le train éloigné, tous disparaissaient. Parmi cette bande de bavards, l’arrivée du jeune Rioux causa une véritable commotion.

— Tiens, le garçon de Jean Rioux qui prend les chars.

— Il en a bien l’air ; où va-t-il donc ? Aux États ?

— Non, il paraît qu’il monte travailler à Québec.

— Quoi travailler à Québec ! Bien voilà du comique : un gros cultivateur comme Jean Rioux laisser partir son garçon pour gagner en dehors l’hiver. Il a pourtant bien assez trimé dans sa vie, pour garder son aide ; il devrait profiter de la morte-saison pour se reposer. C’est bien inutile d’être à l’aise, hein ?

— Si vous croyez que le vieux le laisse partir de bon cœur, vous vous trompez. Il paraît qu’il part pour tout de bon et que le père en fait une vraie maladie.

— Il est bien bête de laisser un si beau bien,

— Jean Rioux est plus fou que moi de se casser la tête à ce propos : qu’il vende et se mette à sa rente.