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Le souffle de la Réforme

sise sur les bases les plus larges et les plus solides qu’il soit possible. »

Mais l’Angleterre avait des problèmes d’une plus grande importance à résoudre. La révolution grondait sourdement et il fallait l’endiguer sans plus tarder. Le gouvernement impérial commençait à se persuader que c’est dans l’homogénéité du Canada français que résidait la vitalité de la conquête anglaise et que son meilleur allié, celui qui lui assurait la soumission de ses nouveaux sujets, c’était le clergé catholique. Quand les États-Unis déclarèrent leur indépendance, les Anglais comprirent que le moment était mal venu de proclamer la suprématie de l’Église d’Angleterre dans le Bas-Canada. En même temps que les mécontentements s’accentuaient chez les protestants, se posait une question politique assez difficile à trancher : Devait-on s’en tenir à la lettre du traité de Paris et donner aux Églises protestantes la suprématie sur l’Église catholique ? Convenait-il, dans une colonie anglaise, d’ouvrir la route à l’extension illimitée de la religion hostile ? Ce n’était ni dans l’esprit, ni dans les traditions de la race anglo-saxonne, ces surérogations de bienveillance et de privilèges accordés au catholicisme, mais l’Église catholique avait eu le bon esprit de faire plaider sa cause par les citoyens les plus représentatifs de l’époque, d’unifier ses droits avec ceux de la nation, en sorte qu’on ne pouvait attaquer la religion sans voir la nation se lever en masse pour la défendre. Le gouvernement se trouvait dans une alternative difficile. Reléguer au second plan la religion d’État du Royaume-Uni, donner la préséance au papisme, c’était une sorte d’abdication de sa dignité comme le fait ressortir délicatement l’évêque Mountain. La conciliation a des bornes. Consacrer la subordination hiérarchique, obligée et normale de la religion protestante à la religion catholique, c’était pousser la tolérance à ses extrêmes limites.

Mais il s’agissait bien de justice, de respect à la parole donnée aux évêques anglicans, de déférence pour la foi d’Élisabeth et d’Henri VIII, quand les intérêts matériels de l’empire étaient