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Papineau

saient, comme mus par un ressort, les yeux désorbités, la bouche agrandie jusqu’aux oreilles, et se mettaient à parler dans une langue étrangère. — On peut en cet état, leur infliger diverses tortures, les pincer, les égratigner, les piquer avec une épingle et ils ne sentent rien. — Un type maigre comme un échalas confessait à haute voix les péchés de sa vie. Une autre racontait le miracle de sa conversion, de quels abîmes de perversion l’esprit était venu l’arracher. Un illuminé disait éprouver de célestes consolations, et de divines voluptés. Ses larmes tombaient drues comme des gouttes d’eau dans une pluie d’été, des mains se crispaient, des bras et des jambes se raidissaient, ainsi que des barres de fer. Une fièvre religieuse, un délire de mysticisme, agitaient tous ces malheureux. De telles scènes, ressuscitées du Moyen-Âge, sont un anachronisme dans notre siècle, et le protestantisme devrait les désavouer, car elles jettent du discrédit sur leur confession. Avoir été les promoteurs du progrès et donner dans ces superstitions, c’est inconcevable ! Être de ces esprits intrépides et généreux qui ont aidé à casser ici la croûte des préjugés séculaires, et souffrir que sous leurs auspices se déroulent des spectacles d’aussi mauvais goût ! Pourquoi avoir voulu que la lumière se fasse dans les esprits, que l’instruction pénètre dans les masses, que le règne de la raison s’établisse dans ce nouveau monde, si d’un autre côté on permet l’abrutissement des foules par le merveilleux et le surnaturel. Les religions doivent évoluer avec les sociétés et celles-là seules peuvent se maintenir, qui s’adaptent à leur milieu. Nous serions bien malheureux si le protestantisme cessait de revendiquer les droits du bon sens après les avoir proclamés si haut.

3. Les protestants français se son anglicisés. C’était fatal. Ils devaient parler la langue de leurs bienfaiteurs et de leurs amis. Il eut fallu une force d’âme voisine de l’héroïsme pour résister à cette force irrésistible qui les attirait vers ceux dont ils partageaient les idées religieuses. Le même accident est arrivé aux Irlandais convertis au protestantisme. Ils ont non seulement oublié le dialecte maternel, mais épousé