Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/118

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champs lui apparaissaient, dans son délire, comme des « faces humaines ».

Passons-lui la plume pour quelques exemples de ces visions fantasmagoriques qu’il se plaît à décrire :


… L’architecture s’introduisit aussi dans mes songes avec la faculté de s’agrandir et de se multiplier. Dans les derniers temps de ma maladie surtout, je voyais des cités et des palais que l’œil ne trouva jamais que dans les nuages. À mon architecture succédèrent des rêves de lacs, d’immenses étendues d’eau ; ces rêves me tourmentèrent tellement que je craignais que quelque affection n’altérât mon cerveau, et que l’organe se prît lui-même ainsi pour objet. Je souffris horriblement de la tête pendant deux mois.

Les eaux changèrent de caractère ; au lieu de lacs transparents et brillants comme des miroirs, ce furent ensuite des mers et des océans ; il se fit encore un changement plus terrible, qui me préparait de longs tourments, et qui ne me quitta, en effet, qu’à la fin de ma maladie.

Jusqu’alors la face humaine s’était mêlée à mes songes, mais non d’une manière absolue ; elle n’avait pas encore eu le pouvoir spécial de m’effrayer. Mais tout à coup ce que j’appellerai la tyrannie de la face humaine vint à se découvrir. Ce fut sur les flots soulevés de l’océan que la face humaine commença à se montrer : la mer était comme pavée d’innombrables figures tournées vers le ciel ; pleurant, désolées, furieuses, se levant par milliers, par myriades, par générations, par siècles ; mon agitation était sans bornes ; mon âme s’élançait avec les flots.


Un peu plus loin :


Dans ma jeunesse, j’ai étudié l’anatomie sérieusement. La première fois que j’entrai dans un amphithéâtre de médecine, il y avait sur la table un grand cadavre étendu dans un drap blanc ; on n’en voyait que les pieds. Le pro-