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tant que le modernisme. Et je n’aime rien tant que la liberté. (Et en elle-même, et n’est-elle point la condition irrévocable de la grâce).

Disons les mots. Le modernisme est, le modernisme consiste à ne pas croire ce que l’on croit. La liberté consiste à croire ce que l’on croit et à admettre, (au fond, à exiger), que le voisin aussi croie ce qu’il croit.

Le modernisme consiste à ne pas croire soi-même pour ne pas léser l’adversaire qui ne croit pas non plus. C’est un système de déclinaison mutuelle. La liberté consiste à croire. Et à admettre, et à croire que l’adversaire croit.

Le modernisme est un système de complaisance. La liberté est un système de déférence.

Le modernisme est un système de politesse. La liberté est un système de respect.

Il ne faudrait pas dire les grands mots, mais enfin le modernisme est un système de lâcheté. La liberté est un système de courage.

Le modernisme est la vertu des gens du monde. La liberté est la vertu du pauvre.

Je dois rendre cette justice à nos abonnés que dans ce gouvernement de la liberté ils nous sont demeurés admirablement fidèles. C’est leur honneur. Et c’est le nôtre. J’ai reproché souvent à nos abonnés de n’être point assez nombreux. Et cette année je le leur reproche au moins autant que jamais. Mais j’avoue que c’est un reproche qui va tout de même un peu plutôt à celui qui n’en est pas qu’à celui qui en est. Ceux qui en sont ont parfaitement compris, je veux dire qu’ils savaient d’avance aussi bien que nous ce que sont les mœurs de la véritable liberté.

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