Page:Cahiers de la Quinzaine - Série 15, cahiers 4-6, 1914.djvu/506

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aurait de s’enfermer dans les remords, s’il n’était, pour sa peine dernière, au-dessus du repentir, le sachant aussi vain que le péché est nécessaire.

La tristesse de Villon est un monde nouveau. Elle s’est formée lentement dans la Bible, et dans les chants de l’Église. Villon embrasse la cruelle nécessité de vivre et d’être ce qu’on est : d’être impur, d’être infâme, d’en jouir avidement et d’en souffrir. Plus il raille, plus il est amer ; mais il se moque aussi de son amertume. Bernard Naudin l’a bien vu rire à son propre enterrement : il rit de lui, il rit de vous ; il rit de ce qu’il n’a pas et de ce qu’il vous laisse ; il rit de sa misère et des legs qu’il vous en fait ; et dans la mort où le voici, il rit de la vie, comme il a ri de tout, ayant été si constamment dans la mort, pendant le temps qu’il a vécu.

À tout reproche, Villon répond par la souffrance. Bien plus, il nous fait répondre pour lui. S’il pleure sur lui-même, et s’il crie à l’aide, il ne vante pas ses larmes. Il s’en rirait plutôt ; à la barbe des bourreaux, pour achever d’être libre, sa souffrance se raille en les raillant. Il a fallu quatre siècles, pour qu’on