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Cahiers du Cercle Proudhon


LA PHILOSOPHIE DE GEORGES SOREL[1]


La destinée n’a-t-elle point fait naître M. Georges Sorel uniquement pour se donner le plaisir de mécontenter les amateurs de pensée médiocre ? J’inclinerais volontiers à le croire et je ne connais point de philosophe avant lui, si ce n’est Proudhon, qui ait su semblablement exaspérer les lecteurs de feuilles conservatrices et les prédicateurs de sagesse modérée.

D’où l’heureux succès de son œuvre. Sans un certain scandale, la gloire de ce mathématicien philosophe n’aurait point irrité la curiosité du grand public. Il a fallu Villeneuve-Saint-Georges, et le sabotage, et la machine à bosseler, et la chaussette à clous pour que le syndicalisme s’affirmât à la bourgeoisie effrayée comme une doctrine capable de fournir des actes. Mais une fois ces actes fournis, on a tenté de remonter à leur cause, et cette cause, pour une bonne partie, se trouve faite d’idées. Ces idées sont exprimées, développées, commentées dans l’œuvre sorélienne. Contenons nos sourires en nous rappelant qu’en l’année 1908 les journaux sages et ministériels attribuèrent à M. Georges Sorel, auteur des Réflexions sur la violence, une grande responsabilité des émeutes ouvrières.

M. Clémenceau, qui est homme d’esprit, dut sans

  1. Troisième conférence mensuelle du Cercle, donnée le 14 février 1912.