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JOURNÉE III, SCÈNE II.

don juan.

Vous ne pouvez être qu’à demi content de moi. Vous vouliez voir votre dame la nuit, et… Mais voici le gouverneur qui entre.


Entre LE GOUVERNEUR.
le gouverneur.

Quoi ! vous ici, don Juan ?

don juan.

Oui, seigneur, je suis prisonnier moi aussi.

le gouverneur.

Vous !… comment cela ?

don juan.

Puisque mon ami est prisonnier, je puis dire avec raison que je le suis également.

le gouverneur.

Bien !… — Mais à ce compte nous sommes tous prisonniers, car tous nous désirons servir don César.

don césar.

Je me tais, seigneur, et par là je crois vous mieux montrer ma gratitude. La parole est impuissante à exprimer les émotions de l’âme. Ainsi je me contente de vous dire : Que Dieu augmente et prolonge votre vie !

le gouverneur.

Voudriez-vous, don Juan, me laisser avec don César ? nous avons beaucoup à parler ensemble.

don juan.

Je m’empresse de vous obéir.

don césar, à part.

Hélas ! quelle occasion je perds !… si encore je pouvais la retrouver ce soir ! (Bas, à don Juan qu’il retient.) Vous voyez ce qui se passe, don Juan. Il pourra se faire que la dame soit déjà à m’attendre avec mon valet chez vous. Allez-y, entrez, car je sais qu’elle aura le visage recouvert de sa mante, — et dites-lui qu’il m’est impossible de l’aller voir. Ajoutez que je meurs de désespoir et de douleur.

don juan.

Comptez-y.

don césar.

À propos, don Juan, puisque vous savez qui elle est, n’ayez pas l’air avec elle de le savoir.

don juan.

Soyez tranquille.

Il sort.
le gouverneur.

Asseyez-vous là, don César.