Page:Camille Mauclair. Le poison des pierreries.pdf/72

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 50 —

où Sparyanthis se reprochait la trahison, Alilat savait, d’un regard, faire naître en sa présence sur le visage de Cimmérion la convoitise. Une fois elle se fit surprendre, demi-nue, au bras du maître. Sparyanthis s’échappa, elle ne le revit pas de tout un jour, sachant qu’il souffrait, et le lendemain ce fut lui qui revint, pâle et ardent. Le germe de haine était entré en lui pour son frère. Il se glissa parmi les gardes endormis. Les torchères presque consumées jetaient des lueurs sinistres, inégales, rayant les grands pans d’ombre des galeries, faisant briller à terre, parmi les tapis et les nattes, des coins de boucliers, des cimiers, des pointes de glaives, et parfois une clarté brusque révélait une chevelure de femme, un sein blanc, une épaule, une hanche ronde, doucement luisante, froissée contre une ceinture de guerre. Car les esclaves, la nuit, rejoignaient les archers et les hoplites, sournoisement. L’effrayante volupté du palais avait fini par détruire les anciennes disciplines, une suggestion d’orgie rôdait dans le vaste domaine, et la lourdeur de la volupté chaleureuse amollissait les hommes. Des soupirs, des balbutiements vivaient dans les ténèbres. Des monceaux de coussins gardaient des formes de corps. Sparyanthis furieux et éperdu, nu sous sa chlamyde, ayant jeté ses sandales, avança parmi tous ces êtres prostrés, jusqu’à l’appartement d’Alilat, sans même penser que son frère pour-