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LES BELLINI.

II

SES ORIGINES.

Si la peinture vénitienne se distingue profondément des autres écoles italiennes par son esprit et sa technique, elle ne s’en distingue pas moins par son évolution historique.

Partout ailleurs, à Florence, à Sienne, en Ombrie, en Lombardie, on peut, d’une manière générale, distinguer quatre grandes phases de développement : Au xiiie siècle, la période hiératique, où la tradition nationale reste fortement empreinte d’influences byzantines ; au xive siècle, la période mystique, au cours de laquelle, tout en s’humanisant et en s’animant davantage, l’art ne perd rien de sa valeur symbolique et religieuse ; au xve, la période légendaire ; une vision réaliste, parfois cruellement réaliste, des choses, s’y combine avec une imagination féconde imprégnée de rêve et tempérée de classicisme ; au xive siècle enfin, la période renaissante, qui voit le réalisme se faire plus aimable et l’imagination s’assagir pour créer ce style conventionnel et décoratif dont a vécu l’art moderne.

Nous retrouvons, à Venise, la première, la troisième et la quatrième phase de cette évolution, mais c’est à peine s’il est possible de relever quelques traces de la deuxième. La peinture vénitienne saute par dessus le xive siècle pour entrer de plain-pied dans le xve et passe, presque sans transition, du hiératisme le plus rigide à la légende la