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LES BELLINI.

courtier vacante au Fondaco dei Tedeschi ». Cette sinécure rapportait 120 ducats par an. Ainsi fut fondée la charge de peintre officiel de la République, dans laquelle se succédèrent Gentile, Giovanni, le Titien et le Tintoret. À l’entretien des fresques, s’ajoutait l’obligation de peindre le portrait de chaque nouveau doge, lors de son avènement au pouvoir.

À Florence, à Milan, à Rome, les artistes étaient, à cette époque, courtisans, ingénieurs ou diplomates. À Venise, ils s’instituaient courtiers d’affaires.

La visite de Gentile à la cour de Constantinople est un exemple, frappant de cet échange de sentiments et d’idées qui s’opérait, à la fin du moyen âge, d’un bout à l’autre du monde civilisé, plus activement peut-être qu’en notre siècle de locomotion rapide.

Après avoir dominé longtemps l’art italien, Byzance en subissait, à son tour, l’influence. Les conquérants turcs enviaient le luxe raffiné des cours de Rimini et de Ferrare. Comme Alexandre et César, ils prétendaient allier à la gloire militaire le prestige des grands mécènes. Mahomet II avait fait traduire, en langue turque, plusieurs classiques grecs et latins : il s’adonnait à l’étude des religions et des philosophies étrangères et cultivait, avec ferveur, la poésie persane. Sigismond Malatesta lui avait envoyé son médailleur Matteo de Pasti et, sur sa demande, le roi de Naples s’était, durant de longues années, privé des services du peintre Costanzo auquel nous devons une mé-