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LES BELLINI.

presque cruellement son double menton. La tête est tournée de trois quart, comme dans le portrait de Mahomet. L’œil, lourd et rêveur, exprime une lassitude et un désenchantement que rend plus mélancolique encore la profusion des bijoux. Sans doute, Gentile n’y lut pas tout cela. Il se contenta de reproduire, en toute sincérité, l’impression que lui suggérait son modèle.

La troisième toile du cycle, datant de 1501, à laquelle était réservée une place à contre-jour, entre les deux fenêtres, a beaucoup moins de valeur que les deux autres et n’est très probablement que partiellement de la main du maître. Elle représente la guérison miraculeuse d’un certain Piero di Lodovico qui, le premier dimanche de janvier 1447, reçut d’un frère un cierge qui avait touché la relique. C’est cette scène qui, suivant une disposition chère à Jacopo, est représentée à l’arrière-plan, sous le tabernacle de l’église, tandis qu’à lavant-plan, plusieurs Vénitiens, portraiturés en demi-figure, jouent le rôle de « spectateurs indifférents ».

Nous avons rappelé les raisons qui poussèrent Gentile à restaurer, vers la fin de sa vie, la décoration de la Scuola di San Marco, détruite en 1485.

S’il n’était plus considéré comme le chef de l’école vénitienne, il n’en était pas moins surchargé de travail, au point qu’il se trouvait obligé de refuser plusieurs commandes importantes. C’est pourquoi, sans doute, il ne put tenir qu’en 1504 la promesse faite à la Scuola dès 1492.