Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/172

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patrie ; et à vous, comme roi, un nouveau titre de grandeur et de gloire ; à vous encore, comme homme, une nouvelle source de jouissances et de nouvelles sensations. »

L’Assemblée en corps reconduisit le roi au milieu des cris d’allégresse du peuple, d’une musique militaire et des salves d’artillerie.

Enfin, j’espérais revoir sur le visage de mes augustes maîtres ce calme qui, depuis si long-temps, en était effacé. La suite les quitta dans le salon ; la reine salua les dames avec précipitation, et rentra fort émue. Le roi la suivait, et, se jetant dans un fauteuil, il porta un mouchoir sur ses yeux. « Ah ! Madame, s’écria-t-il avec une voix entrecoupée par ses larmes, pourquoi avez-vous assisté à cette séance, pour être témoin ?… » Je n’entendis que ces mots ; pénétrée de leur douleur et de la nécessité d’en respecter l’effusion, je me retirai, frappée du contraste de ces cris de joie au-dehors du palais avec la douleur profonde qui existait dans l’intérieur du souverain[1]. Une demi-heure après

  1. Madame Campan, dans un de ses manuscrits, raconte d’une manière plus touchante encore l’anecdote qu’on vient de lire.

    « La reine avait assisté à cette séance dans une loge particulière. À son retour, j’avais remarqué son silence absolu et son air profondément triste.

    » Le roi arriva chez elle par l’intérieur : il était pâle ; ses traits étaient extrêmement altérés ; la reine fit un cri d’étonnement en le voyant ainsi. Je crus qu’il se trouvait mal : mais