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vail ; et le montant de la rente que l’on reçoit ainsi, pour le n° 1, est égal à la différence qui existe entre leurs produits respectifs. Aucune proposition n’a pu être destinée à commander un assentiment plus général. Tout individu qui l’entend énoncer aperçoit autour de lui un terrain qui paye une rente, et voit également que celui qui donne 40 boisseaux par acre paye un revenu plus considérable que le terrain qui n’en donne que 30, et que cette différence est presque équivalente à la différence du produit. Il devient immédiatement disciple de M. Ricardo, et admet que la raison pour laquelle on paye certains prix en retour de l’usage de la terre, c’est qu’il existe des sols de diverses qualités, lorsque assurément il regarderait comme souverainement absurde l’individu qui entreprendrait de lui prouver qu’on paye les bœufs certains prix, parce que l’un de ces animaux est plus pesant qu’un autre ; qu’on paye des rentes pour des maisons, parce que quelques-unes pourront loger 20 personnes, tandis que d’autres n’en logeront que 10, ou que tous les navires peuvent prendre du fret, parce que quelques-uns ont une capacité différente des autres.

Tout le système, ainsi que le lecteur s’en apercevra, est basé sur l’affirmation de l’existence d’un fait : à savoir, qu’au commencement de la mise en culture, lorsque la population est peu nombreuse, et que, conséquemment, la terre est abondante, les terrains les plus fertiles, ceux que leurs qualités rendent propres à rémunérer le plus largement une quantité donnée de travail, sont les seuls cultivés. Un fait semblable existe ou n’existe pas ; s’il n’existe pas, tout le système s’écroule. On se propose en ce moment de démontrer qu’il n’existe en aucune façon, et qu’il serait contraire à la nature des choses qu’il en fût, ou que jamais il pût en avoir été ainsi.

Le tableau que nous offre M. Ricardo diffère complètement de celui que nous avons précédemment soumis à l’examen du lecteur. Le premier, plaçant le colon sur les terrains les plus fertiles, exige que ses enfants et ses petits-enfants se trouvent réduits, successivement et régulièrement, à la déplorable nécessité d’occuper les terrains qui ne peuvent donner qu’une rémunération plus faible au travail, et qu’ils deviennent ainsi de plus en plus, de génération en génération, les esclaves de la nature. Le second, plaçant le cultivateur primitif sur les terrains plus ingrats, nous montre ceux