Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/261

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

société. Dans le principe, il y existe peu de mouvement et une faible puissance de progrès ; mais à mesure que ses membres deviennent de plus en plus capables de s’associer, on voit la faculté d’accomplir des progrès ultérieurs se développer avec une rapidité constamment croissante. Les améliorations accomplies dans ces dix dernières années ont été plus considérables que celles des trente années antérieures, et celles-ci, à leur tour, l’ont été plus que celles du siècle qui avait précédé, et dans ce siècle, l’homme a conquis sur la nature un empire plus étendu que celui qu’on avait obtenu, pendant la longue période écoulée depuis l’époque d’Alfred le Grand ou de Charlemagne.

Cependant pour qu’il puisse exister dans la société un mouvement continu, il faut qu’il y ait sécurité à l’égard des personnes et de la propriété ; mais lorsque les individus sont pauvres et disséminés sur un grand espace, il est difficile d’obtenir l’une ou l’autre de ces conditions. Comme il n’existe alors d’autre loi que celle de la force, partout on a vu l’homme fort disposé à écraser et à piller les faibles, tantôt s’emparant de la terre et les contraignant à travailler à son profit ; tantôt se plaçant en travers de la route et interdisant toute relation commerciale, si ce n’est à des conditions que lui-même doit fixer ; ou encore exigeant que chaque travailleur paie une taxe ou taille, ou, enfin, dépossédant ces être faibles de leurs maisons, de leurs fermes et de leurs outils ; et peut-être vendant pour être réduits en esclavage, les maris et leurs femmes, les parents et leurs enfants afin d’accroître ainsi les dépouilles, trophées d’une guerre glorieuse. Dans toutes ces circonstances, il y a, ainsi que le lecteur l’observera, un retard de mouvement aux dépens de ceux qui vivent de leur travail, et au profit de ceux qui vivent de l’appropriation du produit du travail des autres.

La valeur de toutes les denrées consiste dans la mesure de la résistance à vaincre avant de se les procurer. À mesure que cette résistance diminue, il y a diminution dans leur valeur, et augmentation de celle de l’individu. Tout ce qui tend à favoriser l’accroissement du mouvement de la société tend à diminuer la valeur des premières, et à augmenter celle du dernier. Au contraire tout ce qui tend à retarder les mouvements de la société et à empêcher le développement de la puissance d’association, ou du commerce, tend également à empêcher la diminution des valeurs, à retarder